Exposition Regard sur l’Algérie

Ça va la classe ? Pour les non-initiés, cette formule de bienvenue reste incompréhensible si l’on ignore qu’elle se réfère au vocabulaire des appelés du service militaire du milieu du siècle dernier. Philippe et moi avions en commun une date de naissance très proche : lui avril et moi mai 1942. Dans le contexte de la Guerre d’Algérie, nous fîmes inévitablement notre service militaire au même moment, incorporés avec des dizaines de milliers d’autres dans la même classe, la 62 1/A.C’est seulement après que le Jazz des années soixante nous permit de faire connaissance : autour de la revue Jazz-Hot à laquelle nous collaborions tous les deux, ou dans la fréquentation assidue des différents concerts, dans lesquels il était impossible de ne pas reconnaître sa silhouette de diablotin barbu, se déplaçant de long en large de la scène, le Leica M2 collé à l’œil, à la recherche constante du meilleur angle de prise de vue.Avec nos amis Michel Le Bris et Philippe Constantin, nous devînmes inséparables. C’est à cette époque seulement que j’appris qu’il avait fait son service militaire, tout comme moi, en Algérie. Je lui racontais la Kabylie et les sublimes couchers de soleil sur la plage de Dellys. Lui ne parlait jamais de son expérience en tant que soldat, mais de sa vision, des enfants de Tamanrasset, des bédouins, des Touareg et des sublimes paysages du Sahara, moments fugaces qui n’avaient pas échappé à sa perception de grand photographe.Si vous n’avez pas encore eu la chance de découvrir l’oeuvre musicale de Philippe Gras, regardez avec quelle grâce son regard s’est posé sur l’Algérie de ses vingt ans…

Patrice Blanc-Francard

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